« Finkielkraut, mais avec lui toute la clique des réactionnaires prétendument intellectuels, est devenu le point d'ancrage, la mesure même, de toute vérité publique. Sa "pensée" fait office de mesure, il s'est érigé en "juste milieu". Y a-t-il des violences sexuelles à Cologne provoquée par des individus suralcoolisés et une police défaillante ? Le prêt-à-penser réactionnaire est là pour nous donner une réponse rapide et confortable : c'est le choc des civilisations, cette culture musulmane étant portée sur le viol ! Un sociologue publie-t-il un essai faisant état d'une recherche bâclée, se voyant ainsi justement critiqué par ses collègues ? Revoici le prêt-à-penser, venu nous expliquer qu'il s'agit d'un complot de l'université corrompue par le stalinisme des esprits. Des habitants malmenés, parqués dans des quartiers en ruine, traités par un savant mélange de pénalisation, de précarisation, et d'abandon ont-il l'audace de descendre dans la rue ? Heureusement, la pensée réactionnaire est là, pour nous expliquer qu'il s'agit d'émeutes ethniques.
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Sa pensée est devenue force d'autorité. On peut, évidemment, ne pas penser comme lui, mais il faudra être prêt à se justifier longuement et à être remis en cause avec virulence. Autant d'épreuves qui lui seront épargnées : le discours réactionnaire appartient au registre du "bien entendu", de "ce qui va de soi". Madame Biraben, qui comme chacun sait est une journaliste neutre, n'a-t-elle pas après tout dit qu'il s'agissait d'un "discours de vérité" ? »
« Alors que « dans la vie réelle » les antiracistes, les féministes et les militant-e-s contre l’homophobie sont loin d’occuper des positions dominantes et que les discriminations sont massives et systémiques, les dominants travaillent souvent à inverser, dans leurs discours, les rapports de force structurant l’ordre social : eux les ministres, les députés, les sénateurs, les intellectuels médiatiques omniprésents, seraient soumis à une « dictature » les empêchant de dire ce qu’ils répètent pourtant un peu partout sans jamais être inquiétés. »